Programme de la JE Discours, littérature et littératie numérique
6-6 janv. 2022 Aix-en-Provence (France)

Résumés

Philippe BOOTZ (Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis) -  Numériques : une littérature dans la cité
 
La littérature numérique existe depuis 70 ans. Elle a pris des formes très diverses et a changé de statut au cours du temps. Elle constitue aujourd’hui un champ culturel international dans lequel, à partir de réflexions et propositions sur la langue naturelle et artificielle, sont travaillées des questions essentielles liées au numérique comme la place des algorithmes, le rôle de l’IA, la tension entre contrôle et liberté. L’intervention se propose de donner un rapide aperçu sur l’évolution historique de cette littérature, de présenter les principaux enjeux et problématiques de ses formes de base que sont la génération de texte, la poésie animée et l’hypertexte en insistant sur les objectifs pédagogiques possibles. Enfin un focus spécifique sera fait sur des logiciels faciles à mettre en œuvre et des ateliers d’écriture numérique que j’anime depuis 20 ans.
 
Pascal JOURDANA (La Marelle) – Du projet d’auteur à la publication, expérience(s) d’éditorialisation numérique
 
Je présenterai d’abord les actions de La Marelle, lieu de résidence et de soutien aux auterur·rice·s à Marseille, en faveur de la création d’objet littéraires numériques. Je montrerai ensuite quelques exemples de nos publications, en expliquant les enjeux littéraires et formels de ses œuvres, nos questionnements, et la manière dont ils sont liés à ceux des personnes autrices, qu’elles soit déjà familières des outils et des enjeux de ces types d’écriture ou qu’elles les découvrent. Je m’attarderai surtout sur deux ou trois processus précis d’éditorialisation, ainsi que des travaux en cours. Enfin, j’évoquerai, en tant que structure associatif à but non lucratif, les difficultés (mais peut-être aussi les atouts) concernant la production et la diffusion de ses œuvres.
 
Camille BLOOMFIELD (Université  de Paris) – Le numérique comme outil pédagogique de réflexion et de création : retour d’expérience et atelier d’écriture
 
L’usage pédagogique et créatif du numérique peut se faire principalement de deux manières : d’une façon ponctuelle, le temps d’une séance de cours, pour un atelier ludique et facilement accessible à tous les niveaux, ou d’une façon plus approfondie, sur un semestre ou une année, pour des projets plus ambitieux. Après avoir évoqué un projet mené avec des étudiant·es de Master et les réflexions que ce projet a pu susciter en eux sur la nature de la littérature et la notion de dispositif créatif, l’intervention prendra la forme d’un atelier proposé aux participant·es de la journée, et présentera différentes plateformes et outils possibles pour des ateliers ponctuels, allant de la simple fonction « rechercher/remplacer » sur Word, à un travail sur l’auto-complétion, en passant par le recours aux traducteurs automatiques, aux « chatbots », ou au format « story » sur Instagram.
 
Marcello VITALI-ROSATI (Université de Montréal) – Éloge du dysfonctionnement: outils compliqués, plateformes inutiles, graphismes moches, logiciels anti-intuitifs
 
Depuis désormais quelques dizaines d'années, les grandes entreprises numériques ont naturalisé une manière spécifique de penser et de parler des environnements techniques: une rhétorique qui met en avant certains concepts-clés comme les notions de "simple", "performant", "rapide", "intuitif"... Mais ces concepts rendent impossible une réflexion critique sur les outils, les plateformes et les supports et réduit la littératie numérique à une simple adhésion au discours commercial (savoir faire ce que les entreprises nous proposent de faire, savoir utiliser les outils que les entreprises nous imposent etc.). En faisant l'éloge des outils compliqués, des plateformes inutiles, des graphismes moches et des logiciels anti-intuitifs, je compte montrer où se trouvent les espaces possibles de résistance à cette rhétorique commerciale dominante et montrer où peuvent émerger un véritable esprit critique ainsi qu'une littératie numérique éclairée.
 
Gilles BONNET et Alice PANTEL-CASSAGNAUD (Université Lyon 3 Jean Moulin) – Weblitt, cartographie du web littéraire francophone : enjeux théoriques et perspectives pédagogiques
 
Nous présenterons la plateforme Weblitt et le programme de recherche LIFRANUM dont elle est issue. Outil à la fois destiné à un large public d’enseignants, d’amateurs de littérature contemporaine et à la communauté de chercheurs spécialistes de littérature numérique, ce site a pour objectif de rendre accessible tout un continent partiellement méconnu, de productions littéraires nativement numériques à l’échelle de la francophonie. Alors qu’une première génération de recherches et de créations, attachées à une littérature électronique est en cours d’institutionnalisation, nous proposons l’exploration de productions plurimédiatiques sur sites, blogs et réseaux sociaux. Proposant une vision décentrée de la francophonie et questionnant l’appréhension académique de la littérarité, ce corpus émergent ouvre également de riches perspectives pédagogiques (maîtrise de l’expression, histoire littéraire, narratologie, ateliers d’écriture…).
 
Thierry SOUBRIE (Université Grenoble-Alpes) – Pour une didactique des langues plus sensibles aux particularités du numérique : l'apport de la littérature numérique 
 
Il est frappant de constater, à la lecture des résumés des interventions programmées dans le cadre de cette journée d'étude, combien les personnes qui s'intéressent à la littérature numérique portent une grande attention à la matérialité du numérique. Il est question de "réflexion sur la langue artificielle", d'hypertexte, de "poésie animée", de "génération de texte", de productions "nativement numériques", "plurimédiatiques". Le numérique est également abordé en termes de genre - il est ainsi question du "format story sur Instagram" -, et dans une perspective critique à travers la dénonciation de certains mythes qui l'entourent : simple, performant, rapide, intuitif (on retrouve ici une critique formulée dès le début des années 2000 par Yves Jeanneret).
Dans l'enseignement des langues, les préoccupations sont de toute autre nature. Dans leur grande majorité, les enseignants visent à diversifier les apprentissages (proposer des manières différentes de travailler sur un point de langue ou une compétence langagière) et à dynamiser la classe, à l'aide de quiz et sondages par exemple. Il n'y a guère de réflexion sur les particularités du numérique et sur ses usages. On ne peut que le regretter lorsque l'on sait, à la suite d'Albero (2010), que "l'indifférence aux spécificités des médias" conduit invariablement à l'échec de leur introduction dans l'éducation. Dès lors, on peut se demander dans quelle mesure la littérature numérique, si jamais elle pouvait trouver sa place dans un cours de langue, ne pourrait pas amener les enseignants à changer leur regard sur le numérique et faire ainsi évoluer leurs pratiques ? Voilà une question qui mérite d'être posée et à laquelle nous essaierons d'apporter des éléments de réponse !
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